Hélène Jégado, l’empoisonneuse en série

Rien ne prédestine Hélène Jégado, née le 17 juin 1803 à Plouhinec, à devenir une tueuse en série. Elle naît dans une famille croyante, mais, à 7 ans, elle devient orpheline de mère. Placée comme domestique chez le curé de Bubry, elle se met à boire dès son adolescence. C’est une vraie Bretonne. Moins courant, elle prend également du plaisir à torturer les animaux. Son alcoolisme grandissant, allié à un caractère de cochon, la fait renvoyer de nombreuses places.Elle ne découvre sa vocation d’empoisonneuse qu’après dix-huit ans de tribulation dans le Morbihan, enchaînant les emplois dans les maisons bourgeoises et les presbytères. De domestique, elle devient cuisinière. À 30 ans, elle aurait rencontré une certaine Eugénie avec qui elle tisse des liens d’amitié. C’est elle qui l’aurait initiée au pouvoir de l’arsenic. Hélène passe aussitôt aux travaux pratiques avec son entourage.Elle vient alors de remplacer sa sœur Anna chez l’abbé du village Guern, un certain Le Drogo. Elle se fait d’abord la main sur les deux parents de son employeur. C’est un succès. Ils tombent malades et meurent après d’atroces souffrances. Empoisonneuse, certes, mais aussi bonne catholique. Aussi veille-t-elle sur le vieux couple avec affliction. Elle adore ce rôle.Aussi, Hélène recommence avec la nièce de l’abbé qui n’a que 7 ans. Courageusement, elle enchaîne avec deux autres domestiques, puis avec l’abbé Le Drogo en personne. Et quand sa sœur Anna vient assister aux obsèques, elle aussi a droit à une pincée d’arsenic qui l’amène droit au cimetière ! Le comportement d’Hélène Jégado restera un grand mystère.Si elle n’est pas soupçonnée d’être à l’origine de cette hécatombe, elle, l’unique survivante, c’est que la Bretagne se relève à peine d’une épidémie de choléra, une maladie funeste dont les symptômes ressemblent à ceux d’un empoisonnement. Même l’autopsie du curé n’a pas levé le lièvre. Durant dix-huit ans, la Jégado trace son sillon mortel dans tout le Morbihan. Et jamais elle n’est soupçonnée. Jusqu’au jour où elle est embauchée par un avocat pénaliste nommé Bidart de la Noë, expert des affaires criminelles. Nous sommes alors en 1851. Deux semaines après son arrivée, Hélène a déjà empoisonné une domestique nommée Rose. Sa remplaçante aurait connu le même sort si elle ne s’était pas enfuie de la maison dès ses premiers maux de ventre. La remplaçante de la remplaçante file à son tour au cimetière. Cette fois, les médecins et l’avocat pénaliste soupçonnent un empoisonnement à l’arsenic. L’autopsie des corps le confirme. Tous les regards se portent sur Hélène Jégado. On se rappelle alors tous les décès subits qui ont marqué sa carrière. La voilà arrêtée, malgré ses dénégations farouches. La nouvelle électrise toute la Bretagne. Les feuilles de chou en font des tonnes.L’enquête diligentée par les gendarmes a vite fait d’accabler la cuisinière. Le 6 décembre 1851, Hélène Jégado comparaît devant la cour d’assises d’Ille-et-Vilaine. La salle du tribunal de Rennes est bourrée à craquer. On se bat pour assister au procès de l’empoisonneuse. L’avocat qui la défend n’a que 24 ans, mais il vient de sauver la tête de deux meurtriers. Il choisit de plaider la folie, mais les témoignages sont accablants. Ce qui ne l’empêche pas de lancer aux jurés : « Ma conscience ne me reproche rien puisque je suis innocente ! » Elle rajoute : « Je n’ai jamais donné la mort à personne. Si je l’avais fait, je le dirais. Et je dirais que je mérite de mourir moi-même ! » Des arguments qui glissent sur les jurés comme de l’eau sur les plumes d’un canard. Ils la déclarent coupable sans circonstance atténuante. Le 14 décembre, elle est condamnée à la peine capitale pour cinq empoisonnements et cinq tentatives d’empoisonnement. Les autres crimes remontant à plus de dix ans sont prescrits. En entendant le verdict, Hélène Jégado ne désarme pas : « Je suis victime de faux témoins et de méchantes langues. J’ai ma conscience pour moi. Le Bon Dieu est juste, et il nous jugera t...

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