Mathieu Slama : « La démocratie est aujourd’hui un champ de ruines »

En temps de crise, d’urgence, quand un pays, une région et même tout un monde semble sombrer, un réflexe courant consiste à larguer la liberté par-dessus bord. On serre les vis maintenant, les circonstances l’exigent, on aura bien le temps de voir plus tard. Après tout, la liberté n’est-elle pas un luxe permis par des temps paisibles et prospères ?


Pour Mathieu Slama, invité du nouvel épisode des Contrariantes, il en va au contraire d’un des pires périls qu’une société peut affronter, sans aucune garantie de s’en remettre à court et moyen terme. Consultant et analyste politique, enseignant en communication politique, Mathieu Slama a commencé sa carrière d’essayiste en 2016, avec un premier livre publié aux éditions de Fallois, La Guerre des mondes, réflexion sur la croisade idéologique de Poutine contre l’Occident, plus que jamais d’actualité à l’heure de l’invasion russe de l’Ukraine.


Mais c’est surtout pour son Adieu la liberté, essai sur la société disciplinaire, paru en janvier aux Presses de la Cité, que Peggy Sastre et Laetitia Strauch-Bonart ont décidé de convier Mathieu Slama à leur micro. Dans ce livre, l’essayiste y analyse, avec l’aide de Michel Foucault, Gilles Deleuze et Giorgio Agamben, le tournant décrit comme liberticide que la pandémie de Covid-19 a fait prendre à la France, pays pourtant réputé pour sa passion de la liberté et de l’anticonformisme.


« Avec l’assentiment d’une majorité de Français, écrit Mathieu Slama, une société de l’ordre et de la surveillance s’est installée ; la démocratie est devenue management, le politique s’est effacé devant la science et les citoyens libres se sont transformés en population docile à discipliner. Une éclipse de la liberté préparée de longue date par des renoncements successifs. » Selon l’essayiste, la crise sanitaire n’a fait en réalité que cristalliser un mouvement plus ancien et remontant notamment aux années 2010 avec la réaction au terrorisme islamiste. Pour, en fin de compte, révéler un nouveau totalitarisme « soft », fondé sur une idéologie du « safe ».


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